Toucher jusqu’à l'arrachement ses cheveux : la trichotillomanie

Mardi 14 septembre 2021

Deux mots : toucher et cheveu

Le toucher est un de nos 5 sens, il est présent dès notre arrivée au monde. Le nourrisson est un être dépendant, il a besoin d’être tenu entouré nourri enveloppé de soins qui, forment un bain dans lequel il va se constituer se « tricoter Â». Le son de la voix, les odeurs, la peau les cheveux le toucher de cet autre qui prend soin de lui sont vitaux pour sa construction. (Concepts développés par le pédiatre Donal Winnicott)

Un déséquilibre dans les soins apportés à l’enfant (« trop de trop Â» ou « trop de rien Â») peut provoquer des carences plus ou moins profondes dans la construction du sujet.

Le cheveu

Le cheveu fait parti intégrante du corps de la mère.Il peut même pour certains devenir cet objet transitionnel entre elle et lui (objet transitionnel : objet qui va apporter une tranquillité une  assurance qui remplace la mère pendant son absence). Le cheveu quand il prend cette place, sera à la fois celui qui apaise mais où se règle tout les débordement émotionnels, ce qui pourra se traduire par toucher câliner suçoter son cheveu, mais également arracher, triturer, manger.

Les relations que le sujet a avec son corps se constituent dès sa naissance.

 Pourquoi passe-t-on d’un lieu de réassurance où  toutes nos émotions vont pouvoir se placer : amour, colère, joie, peine ; on enlace et on jette son doudou, à une violence destructrice ? Que se passe t il quand cela se transforme en rituel et parfois en addiction, pulsion dont on n’arrive plus à se défaire ?

On arrache, on prends parfois une pince à épiler on malmène  on triture ses cheveux ; les cheveux sont devenus le lieu de tout les règlements de comptes de haine d’amour et de rééquilibrage émotionnels.

Le cheveu et la chute

Parfois sans obligatoirement de sens pour le sujet ils tombent, ils chutent, ils ne repoussent plus pour certains. Un diagnostic est posé:  « C’est la saison c’est la fatigue, un problème hormonal, c’est une pelade Â»

C'est la sidération, l'angoisse:" De quoi est-il question "? « Que se passe-t-il dans mon corps Â» ? "A quoi me renvoie cette perte " ?

Le deuil, la mort et le vivant

Un deuil une perte : un choc sans mot.Après un choc violent une perte, certaines personnes n’ont pu poser de mot; c’est leur corps qui va s’exprimer. Il ne faut pas oublier qu’au cours de la pelade les follicules pileux sont détruits par les lymphocytes.

Le corps s’autodétruit.

Le cheveu révèle notre santé physique et psychique. Il nous inscrit dans le temps : le cheveu vieillit. Dans toutes les sociétés humaines il est connu que la chute des cheveux est saisonnière qu’elle est sensible également à l’équilibre hormonal.

Lors d’un deuil, déjà dans l’antiquité égyptienne les pleureuses s’arrachaient les cheveux. La force de Samson se trouvait dans ses cheveux, la puissance sexuelle  qu’elle soit féminine ou masculine se trouve dans cette parure qu’est le cheveu.

Leur chute due à la fatigue, au vieillissement ou une pathologie : la pelade par exemple ou une thérapie comme une chimiothérapie est très rude. Certaines personnes font une dépression, ont des pensées morbides, d’autres expriment une rage un désespoir.

 Le Vivant

 Comportement pathologique ou tentative de reprise d’un contrôle de soi

La trichotillomanie me semble rester du côté vivant. Le cheveu est pris comme objet d’un règlement de compte. Même si ce comportement paraît destructeur et douloureux à vivre, je le perçois comme une manière de réguler ses émotions parfois même de trouver un équilibre dans ce déséquilibre.

Le cheveu symbolise un lien, or un lien peut également nous lier et nous enfermer dans une dépendance. En l’arrachant il y a comme une reprise d’un contrôle.

Or toute dépendance est indissociable  d’une domination, d’une emprise dont l’individu n’a jamais pu se défaire.  Elle révèle une impossibilité à se détacher. L’arrachage est associé à une douleur mais également  un plaisir .Répétant et inscrivant ainsi une situation connue enfant, (amour et haine ; la pulsion de vie et la pulsion de mort sont liées) qui abîme certes mais qui n’est pas étrangère à sa construction ; « préfèrant Â» subir face à une rupture « impensable Â».

La douleur puis la honte provoquée par l’arrachage, capte l’esprit du sujet ; sa souffrance a trouvé un lieu. Le cheveu devient l’espace de tous les règlements de compte, où le sujet va gérer ses débordements émotionnels. Dans ce passage à l’acte quelque chose fonctionne en réponse à une impuissance plus profonde : une impossible séparation.

La fixation à cet objet-cheveu empêche le sujet de faire le moindre  renoncement, le moindre deuil, le moindre mouvement. Il est au supplice, il est en grande souffrance mais il ne peut s’en défaire. Ce qui se traduit par un arrêt du temps. Dans cet espace le sujet est comme à l’abri : il passe à l’acte, sans que rien ne bouge. Là il peut jouer et rejouer ses tensions, et s’en déprendre. 

Une thérapie peut apporter au sujet un lieu un espace où se dernier va pouvoir créer son espace propre. C’est cet espace qui lui permettra de faire un écart de se détacher sans rompre sans se détruire ou détruire.

 

 

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